Diplomatie des villes et coopération décentralisée
Diplomatie des
villes et coopération décentralisée :
Un éventail de solutions pour la paix et le développement en Afrique
Réunion du Samedi 28
février 2009
La coopération décentralisée
Par
Mohamed Larbi HAOUAT
Président
d’ASILEC
Au moment où le monde est secoué par des crises structurelles très
graves, réfléchir à la coopération décentralisée est au cœur des préoccupations
tant publiques que privées. Cette prise de conscience redonnera-t-elle quelques
lueurs d’espoir pour un développement concret et durable ? Espérons-le.
Qu’est ce que la coopération
décentralisée ?
La coopération décentralisée est une action conduite par les
collectivités territoriales (régions, départements, communes, villes et
structures intercommunales) pour développer des relations avec des
collectivités étrangères. Il peut s’agir d’actions de promotion économique à
l’étranger, d’aide au développement, d’assistance technique, de rayonnement
culturel, d’action humanitaire, de jumelage, de coopération transfrontalière et
de coopération interrégionale. On parle bien de coopération Nord-Nord, de
Coopération Nord-Sud, ou encore de Coopération Est-Ouest. La coopération
décentralisée étant nécessairement régie par des conventions, il est utile
d’appréhender les instruments juridiques qui permettront de développer l’action
extérieure en valorisant le savoir-faire, les compétences et les ressources des
collectivités territoriales allouées aux partenaires des pays en voie de
développement.
Cadre juridique :
La coopération décentralisée n’est pas une compétence nouvelle des
collectivités territoriales puisque l’article 72 de la Constitution stipule que
les collectivités territoriales « s’administrent librement » ce qui était
déjà un feu vert pour l’exercice d’une action extérieure. La loi a consolidé
progressivement cette démarche par la suite en élargissant les compétences des
collectivités territoriales dans le domaine de la coopération décentralisée.
En effet, l’article 131, titre IV de la loi d’orientation n° 92-125 du 6
février 1992 relative à l’administration territoriale stipule : « Les
collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des
conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs
groupements dans les limites de leurs compétences et dans le respect des
engagements internationaux de la France. »
Une circulaire du 10 mai 1994, signée par le Ministère de l’intérieur et par
le Ministère des Affaires étrangères, donnait des précisions à cette
loi : «
- Par convention, il faut entendre tout contrat ou acte signé entre des
collectivités territoriales, françaises et étrangères, comportant des
déclarations, des intentions, des obligations ou des droits opposables à l’une
ou l’autre parti. Sont visées par la loi aussi bien les conventions ayant un
caractère déclaratif que celles qui peuvent avoir des conséquences matérielles,
financières ou réglementaires pour ces collectivités.
Que la
collectivité territoriale soit engagée financièrement, matériellement ou non,
la convention est la voie privilégiée de la coopération décentralisée pour tous
les types d’intervention…
- La
possibilité de passer des conventions est ouverte aux communes, aux départements,
aux régions et à leurs groupements, qu’ils s’agissent des groupements
intercommunaux, des ententes départementales ou régionales ou des syndicats
mixtes…
- En
toutes circonstances c’est la collectivité territoriale qui assure la
responsabilité de sa coopération décentralisée. Cependant, elle peut déléguer
par convention sa maîtrise d’œuvre à un établissement public ou à une
association privée.
Pour la bonne marche, la
collectivité locale française ne devait pas se trouver en situation de
« gestion de fait ». Aucun élu ne doit exercer de responsabilité au
sein de l’association qui reçoit une subvention pour la mise en œuvre d’une
action de coopération décentralisée.
Pour plus d’information, il est recommandé de consulter le Guide de la
coopération décentralisée : Échanges et Partenariats internationaux des
collectivités territoriales. (2e Édition de la Documentation
Française. Paris 2006. 178 p). C’est un ouvrage de référence pour une
information générale en la matière. Il présente des procédures, des acteurs,
des partenaires, un répertoire d’adresses utiles et une bibliographie
sélective.
Nature et formes de la
coopération décentralisée :
Selon la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD),
3800 collectivités françaises ont participé à la réalisation de 8 000 projets
de coopérations décentralisées dans 120 pays. (cncd.diplomatie.gouv.fr/frontoffice).
Il fallait signaler que toutes les régions et toutes des grandes villes
françaises ont été impliquées. La CNCD a mis en ligne cette année un Atlas de
la coopération décentralisée qui a présenté une cartographie interactive
thématique des projets des coopérations avec les partenaires en France et à
l’étranger. Cet Atlas deviendra ainsi un
véritable outil de travail, grâce à une base de données très riche en la
matière et sera mis à jour périodiquement.
Le ministère des Affaires étrangères et européennes encourage la
coopération décentralisée en offrant un appui considérable aux collectivités
locales par les services de son réseau de la Direction générale de la
coopération internationale et du développement (DGCIP) et par les cofinancements
qu’il met en place. On peut distinguer au moins trois formes de coopération
décentralisée :
1 - La coopération
transfrontière : C’est la
relation de voisinage qui instaure cette coopération au travers de la
frontière. Ce genre de coopération date de la loi du 2 mars 1982 par son
article 65. La circulaire du 26 mai 1983 a reconnu l’action extérieure des
collectivités territoriales. La pratique des jumelages est connue après 1945
pour panser les séquelles de la deuxième guerre mondiale et redonner de
l’espoir à la réconciliation franco-allemande. Les jumelages ont été donc les
ancêtres de la coopération internationale.
2 – La coopération
interrégionale : Elle
représente toute coopération et partenariat entre les régions françaises et les
régions étrangères, notamment au sein de l’Europe comme le Rhône-Alpes,
Bade-Wurtemberg, Catalogne et Lombardie.
3 – La coopération
décentralisée : C’est une
action régie par une convention liant une ou plusieurs collectivités
territoriales (régions, départements, communes et leurs regroupements) et une
ou plusieurs autorités locales étrangères pour un intérêt commun. Mais aucune
convention ne peut être passée entre une collectivité territoriale ou un
groupement et un État étranger.
Les critères et les priorités
d’éligibilité à la coopération décentralisée
Les procédures de l’instauration de cette coopération sont multiples et
complexes. Il n’est pas toujours facile de simplifier ces règles qui sont en
évolution constante. Ce qu’il faut retenir c’est que le domaine est balisé par
des repères réglementaires à respecter. La liste des pays et territoires
bénéficiaires de l’aide publique au développement est longue. Elle est
classifiée selon le revenu national brut (RNB). Nous retenons une
classification à quatre niveaux :
- Les pays les moins avancés
- Les pays à faible revenu (PFR) : inférieur à 745 dollars
- Les pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure : 746-2975
- Les pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure : 2976-59205
dollars.
Cette classification détermine donc la zone de solidarité prioritaire la
(ZSP) qui nécessite une aide publique de développement.
Quelles sont les formes
d’intervention de la coopération décentralisée :
Il semble que nous touchons un domaine très vaste et très diversifié, car
il s’étend d’un simple microprojet de construction de petits équipements à des
grands projets de développement rural ainsi que d’aménagement urbain. L’action
englobe à la fois le développement économique, social, culturel, technique,
l’éducation, la santé, la formation, la recherche, l’expertise, le sport. Il
s’agit aussi de la solidarité, la lutte contre la pauvreté, l’aide d’urgence,
l’humanitaire, le don de livre, le transfert de technologies, les échanges des
jeunes, l’agriculture, les travaux de reboisement, d’irrigation et la liste
n’est qu’indicative…
En tout cas, les projets mis en œuvre dans ce cadre devront soutenir les
priorités suivantes :
- La croissance économique africaine.
- La politique du développement durable.
- La diversité culturelle et linguistique.
- La lutte contre le réchauffement climatique et les tsunamis.
- Le développement de la culture vivrière, la sécurité alimentaire et la
lutte contre la désertification.
- Appuyer le rôle et la place des femmes dans le processus du développement.
- La solidarité numérique et l’innovation technologique.
Il apparaît donc que le panel est très large. Pour finir, il est utile
d’illustrer cette démarche de mutualisation par quelques chiffres pour
s’apercevoir de l’importance de cet apport.
Bilan quantitatif des appels à
projets 2007-2009 :
Sur 283 projets ont été déposés par les collectivités territoriales et
les réseaux régionaux de coordination, 245 projets ont été retenus. Pour faire
aboutir la réalisation de ces projets, il fallait 79 millions d’euros dont 24
millions de subventions, auxquels, il fallait ajouter le montant des
cofinancements du ministère des Affaires étrangères et Européenne qui s’élève à
17 millions d’euros.
La répartition géographique des
79 millions d’euros :
- Afrique du Nord : 5,8 millions d’euros soit 8 %
- Afrique Sud du Sahara : 45,1 millions d’euros soit 57
- Moyen-Orient : 3,5 millions d’euros soit 4 %
- Asie : 11,6 millions d’euros soit 15 %
- Europe : 7,3 millions d’euros soit 9 %
- Amérique : 4,7 millions d’euros soit 6 %
- Ailleurs : 1 million d’euros soit 1 %
La répartition géographique des
17 millions d’euros :
- Afrique du Nord (3 pays) : 1 528 500 euros soit 9,19 %
- Afrique Sud du Sahara (15 pays) : 9 244 600 euros soit 55,42 %
- Moyen-Orient (2 pays) : 665 345 euros soit 3,98 %
- Europe (19 pays) : 1 171 960 euros soit 10,29 %
- Amérique (9 pays) : 979 550 euros soit 5,88 %
- Asie Centrale et du Sud (6 pays) : 2 543 500 euros soit 15,24 %
Pour conclure la coopération décentralisée a pour objectif de favoriser
la solidarité internationale par l’échange de savoir faire pour le
développement durable à destination surtout des centres urbains. Ainsi elle
contribue à mettre en évidence l’effort accompli par la France en matière
d’aide au développement.
Deuxième
Partie
Les
migrants, acteurs de l’action humanitaire et du développement
La deuxième partie de la réunion a davantage mis
l’accent sur le rôle inventif des populations immigrées pour stimuler des
projets humanitaires dans leurs pays d’origine. Ici, le rôle de la métropole
d’accueil apparaît plus diffus que dans le cas précis des opérations de
jumelage. Certes, il s’agit là encore de trouver des financements et
d’acheminer une aide locale et ponctuelle. Mais les acteurs sont beaucoup plus
directement les migrants eux-mêmes, soutenus par des municipalités qui
octroient des subventions, prêtent des locaux, font passer l’information, mais
restent malgré tout à distance de l’action.
Amélie Gomez : une
sénégalaise de Cachan au service des enfants hydrocéphale.
Cachan,
dans le Val de Marne : une « ville sans qualité », une simple
station comme une autre que des milliers d’usagers du RER B traversent chaque
jour. Des pavillons, des cités, une population mobile dans un cadre assez
anonyme, comme si Cachan n’était qu’un échantillon de « la
banlieue ». Cette banlieue souvent dépeinte comme un casse-tête à cause
des problèmes d’immigration et d’intégration. C’est dans cette banlieue
justement, sur le quai du RER, que nous retrouvons Amélie, pour l’amener à la
réunion du « rêve africain ». Elle doit y présenter son action d’aide
aux enfants hydrocéphales. Dans le RER puis le métro, puis dans les rues de
Paris, la relation se tisse peu à peu, et l’on découvre une personne singulière
derrière une silhouette africaine comme on en croise des milliers. « Je
suis née au Sénégal, d’une famille cap-verdienne, d’où mon nom, Amélie Gomez. Je
suis venue en France, je suis aide-soignante, c’est tout. »
Mais comment
alors est-elle devenue cette personne très appréciée à Cachan, invitée à parler
dans beaucoup d’écoles, et qui s’est exprimée deux fois sur une chaîne de
télévision sénégalaise ? « Quand je suis allée la première fois, je
ne savais pas que j’allais faire un direct sur le plateau, à l’heure de grande
écoute. J’ai parlé avec mon cœur, sans note. Ils ont cru que j’étais une vraie
professionnelle. Au départ, je ne connais rien à l’humanitaire, à
l’associatif. »
Retour
sur un parcours singulier. Devant les habitués de la commission du « rêve
africain », Amélie retrace la genèse de son engagement humanitaire. « J’étais
partie rendre visite à ma sœur, infirmière à Dakar. Elle m’a montré un enfant
hydrocéphale, à la tête monstrueusement gonflée. Je n’avais jamais vu d’enfants
comme cela. Nous avons pris des photos, et de retour en France, j’ai présenté
cette photo à des amis, qui m’ont présentée à d’autres personnes. Finalement,
nous avons pu collecter les 8 000 francs de l’époque pour l’opération et
la pose d’une valve. Après ce premier succès, j’ai pu créer une association
avec l’aide de mes amis, et nous avons jusqu’à présent, grâce à cette
association et en partenariat avec d’autres, pu sauver environ 600 enfants.
« C’est vrai que la ville de Cachan est un partenaire indispensable, qui a
sans cesse renouvelé sa subvention à mon association, qui me permet d’avoir des
locaux et d’établir des partenariats avec d’autres associations de la ville,
par exemple pour organiser des concerts. »
Pour en
connaître davantage sur l’action de Enfants Hydrocéphales d’Afrique, consulter
le blog
ou
prenez contact directement avec Madame Amélie Gomez
01
46 63 52 00
06
64 03 38 24
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(à suivre)